C’est le pavé que Claude Guéant, Secrétaire Général de l’Elysée a lancé dans la marre du petit monde politico médiatique ce week-end, lors d’une interview donnée à Radio J.
Le même Claude Guéant a d’ailleurs confirmé ses propos hier matin sur RTL en précisant que la question était examinée par l’exécutif gouvernemental d’éventuellement interdire, si cela est juridiquement possible, la candidature des 5 listes antisionistes présentées par l’ancien humoriste Dieudonné (devenu moins drôle et beaucoup plus sinistre depuis qu’il s’est aventuré sur le terrain politique) aux élections européennes du 7 juin prochain.
Cette hypothétique interdiction de listes dont le moins que l’on puisse dire est qu’elles correspondent fort peu à l’idéal républicain que nous sommes nombreux à partager a suscité pour l’instant diverses réactions.
Tout d’abord, le Président du Front National, celui des écarts célèbres tels que « Durafour crématoire » ou du « détail de l’histoire » est bien évidemment venu au secours de son nouveau « parti frère » estimant que « les inconvénients de la censure sont plus graves que ceux de la liberté ».
Le parti socialiste ensuite a eu curieusement une réaction assez mitigée par la voix de son parte parole Benoît Hamon. Ne voulant probablement pas, pour des raisons d’affichage politique, se placer sur la même longueur d’ondes que le gouvernement, mais n’étant pas idéologiquement en situation de critiquer une telle proposition, ce dernier s’est interrogé sur les « calculs derrière cela », estimant qu’il s’agirait d’un « coup électoral » et ajoutant qu’il faudrait alors, en raison de ses propos sur les chambres à gaz interdire les listes de Jean-Marie Le Pen.
Pour ma part, je trouve les questions posées par cette situation assez simples à résumer :
Une démocratie doit-elle accepter dans le champ politique des mouvements qui sont eux même profondément antidémocratiques ou qui font l’apologie de thèses condamnables par les règles qu’elle s’est fixée ?
Notre droit permet-il, en l’état actuel l’exclusion de tels mouvements du débat politique ?
La République peut-elle et doit-elle, tout accepter et si elle ne le fait pas, est-elle encore une démocratie ?
Il s’agit-là d’un débat fondamental qu’il est impossible de trancher en quelques lignes et qui nous éloigne des problématiques directement liées aux programmes des candidats aux élections européennes, mais les thématiques défendues par Dieudonné ont-elles quoi que ce soit à voir avec cette campagne ?
A titre personnel, partant du constat que nombre de dictatures ou de régimes destructeurs pour les Droits de l’Homme et les libertés sont arrivés au pouvoir en utilisant les faiblesses mêmes des régimes démocratiques, je ne serais pas choqué si ces listes antisionistes étaient interdites.
Ceci étant, si cela devait être le cas, cela poserait inévitablement la question plus large de l’acceptation ou non dans le paysage politique français des deux extrêmes, qui à droite, comme à gauche n’ont à mon sens rien à voir avec notre République et dont les thèses ont fait partout ou elles ont étés expérimentées la démonstration de leurs inepties.
Ainsi, au-delà de l’épiphénomène Dieudonné qui heureusement, ne représente guère que lui, n’a aucune chance d’avoir des élus ou même de voir sa campagne remboursée en raison de la faiblesse des scores qu’il peut espérer, est-on prêt à aller jusque là ?
Est-on prêt dans un souci de cohérence, comme s’interrogeait Benoît Hamon au sujet de l’extrême droite, à appliquer cette même logique à des partis qui totalisent de 15 à 25 % des voix selon les scrutins ?
Difficile à comprendre ce sujet… Ou va la nation des droits de l’homme? ou va le pays de la liberté? ou va la nation de la différence? Nous nous enfermons nous-même dans des interdictions qui n’ont lieux d’être… La xénophobie est à vaincre…ou alors les actes tels que ceux de Youssouf Fofana, qui plus est est ivoirien, deviendront banaux… triste France…